Dans la ville des veuves intrépides, de James Cañón

Publié le par Charlotte Cadorel

Auteur : James Cañón
Traduction : de l’anglais, par Robert Davreu
Éditions : Le Livre de poche, 2012
Genre littéraire : Drame, Fiction
Catégorie du challenge des Littéravores : 9. Le premier roman d’un auteur
476 pages
 
Résumé : Depuis le jour où les guérilleros ont débarqué et réquisitionné tous les hommes du village de Mariquita, les femmes sont livrées à elles-mêmes. Qu’à cela ne tienne ! Les ménagères soumises, les épouses dociles vont instaurer un nouvel ordre social. Ainsi, les très moustachues sœurs Morales décident de remédier à leur condition de célibataires frustrées en créant un bordel ambulant ; Francisca, la veuve d’un grippe-sou notoire, mène la grande vie après avoir découvert le magot de son mari. Et puis il y a la tenace Rosalba, autoproclamée maire, et le padre Rafael, seul rescapé de la gent masculine, volontaire pour assurer la procréation de la nouvelle génération...
 
Mon avis : J’ai reçu ce livre dans ma première box Kube et je dois dire que je n’ai pas été déçue du choix du libraire.
 
Grâce au découpage du livre en différents chapitres, qui font plus penser à des petites chroniques sur la vie à Mariquita qu’à une histoire intégrale, beaucoup de thèmes sont abordés, mais en ressort notamment l’émancipation des femmes. Tout au long du livre, cette émancipation des femmes vis-à-vis des hommes se met en place progressivement, jusqu’au point où lorsque quatre rescapés rentrent chez eux après seize ans consacrés à la guérilla, ils ne reconnaissent plus leur femme/mère et ces dernières les accueillent assez froidement. Les premiers chapitres illustrent surtout comment chacune des veuves réagit à l’absence des maris ou des fils. Parmi ces « chroniques », mes préférées sont celles de Francisca, la femme qui découvre le butin de son mari et part à la ville pour mener la belle vie, se découvrant ainsi une attirance pour les femmes, et celle de l’Autre Veuve, Santiago, un des rares rescapés masculins qui a perdu son amant et qui était absent lorsque les guérilleros sont venus chercher les autres hommes. Ces deux histoires m’ont notamment émue, car ces deux personnalités à la sexualité à contre-courant de celle des autres veuves ont rapidement été acceptées comme elles sont, sans chichi.
 
Malgré le côté un peu chronique de chaque chapitre, quand on les lit dans leur intégralité, ils forment tout de même un récit à part entière, dans le sens où les événements qui se produisent dans l’un expliquent l’évolution de tel ou tel personnage. La fin du roman est plus linéaire, avec la mise en place des mesures qui deviendront la norme finale dans le village. J’ai beaucoup aimé le concept du temps féminin inventé par l’auteur, qui est une très bonne trouvaille. De manière générale, toutes les innovations conçues par les femmes du village pour survivre sont très ingénieuses, et c’est aussi un aspect qui m’a beaucoup plu dans le livre. J’ai donc beaucoup aimé la fin du livre, où on découvre une manière de vivre très écologique, avec la nature, et très inspirante !
 
De plus, même s’il s’agit d’un livre dramatique, le ton employé par l’auteur, très burlesque et parfois absurde, permet de dédramatiser la situation de ces femmes, alors qu’elle n’est vraiment pas idéale au tout début du roman.
 
Côté personnages, les veuves ont toutes un côté très attachant, on a envie de continuer à lire leurs histoires et de les voir réussir à se sortir des situations les plus difficiles. Le fait qu’elles n’aient pas que des qualités, mais aussi beaucoup de défauts, les rend très réalistes. De plus, le roman présente une belle diversité des genres et orientations sexuelles, notamment grâce à Santiago (l’Autre Veuve), Francisca, puis plus tard lorsque plusieurs veuves du village tombent amoureuses d’autres veuves. Mention spéciale à Julia Morales, née Julio, que sa mère a « déguisé » en fille pour qu’il ne lui soit pas enlevé par les guérilleros et qui, à partir de ce moment, décide qu’elle est une femme, et que tout le monde accepte en tant que telle. J’ai trouvé que c’était une belle leçon de tolérance.
 
Pour conclure, j’ai trouvé ce livre très dépaysant, mais aussi très rafraîchissant, avec ses personnages hauts en couleur et qui n’ont pas la langue dans leur poche. Je n’en ai pas parlé avant, mais j’ai également beaucoup apprécié les passages à la fin de chaque chapitre, qui sont des témoignages (fictifs, je pense) des hommes pendant la guerre, qui ajoutent un côté un peu documentaire au récit et qui permettent de comprendre un peu la situation en Colombie. Une très belle découverte grâce à la box Kube (merci à Aymeric, le libraire qui a choisi le livre pour moi 😊).
 
Voilà pour aujourd’hui, je vous retrouve très très bientôt pour un nouveau commentaire sur ma lecture en cours : Le Consentement de Vanessa Springora

Publié dans Livres

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